INVENTAIRES FERROVIAIRES de FRANCE
INVENTAIRE
des TRANSBORDEURS
(alias chemins de fer aériens)
Cette rubrique n'a pas pour but de se substituer aux excellents sites qui parlent des transports par câble : téléphériques, remontés mécaniques et funiculaires. Mais l'étude des réseaux spéciaux démontre que les petites voies ferrées minières étaient souvent associées à l'usage de transbordeurs aériens, notamment dans les régions montagneuses et accidentées, ou dans les régions fortement industrialisées et urbanisées du nord et de l'est de la France. De même dans certaines régions où la culture de la betterave à sucre s'effectuait sur des plateaux, mais où il fallait ensuite descendre la récolte vers des sucreries ou des distilleries qui se trouvaient en fond de vallée. C'est pourquoi notre site comporte cette rubrique spécialisée qui ne recense pas tous les transbordeurs aériens ayant existé, mais uniquement ceux qui avaient un lien direct avec le ferroviaire ou dont on peut considérer qu'ils remplaçaient une voie ferrée dont la réalisation aurait été difficile. Ainsi, par exemple, la plupart des transbordeurs forestiers, engins éphémères le temps d'une coupe, de même que les transbordeurs chargés d'amener les stériles du carreau de la mine à un crassier ou terril proche, n'entrent pas dans notre champ d'étude.
En effet, les chemins de fer classiques montrent très vite leurs limites dans les zones de relief. Ils exigent d'importants travaux de terrassement et la construction de nombreux ouvrages d'art : ponts, viaducs, tunnels et murs de soutènement inférieurs ou supérieurs ; toutes choses très onéreuses. Et il en va à peu près de même dans les zones urbaines où il faudrait procéder à des expropriations pour créer des couloirs de circulation.
Certes l'implantation de pylônes et de câbles est toujours difficile et délicate, mais elle s'avère beaucoup plus rentable et rapide que la conception d'une voie ferrée. C'est pourquoi notre travail prend en compte les transbordeurs qui viennent en prolongation des chemins de fer classiques. D'autant que dans certains cas, les bennes ou les caisses de chargement étaient conçues pour pouvoir être transférées directement d'un système à l'autre, rendant ainsi pleinement valide cette notion de chemins de fer aériens, notamment pour les transbordeurs militaires allemands des Vosges pendant la Première Guerre mondiale.
Le lecteur trouvera deux introductions aux téléphériques et transbordeurs aériens sous ces deux liens un et deux. Mais leur histoire peut brièvement se résumer comme suit :
Les premiers téléphériques simples sont à peu près contemporains des premiers chemins de fer. Ils se composent d'un câble porteur sur lequel roule le bras de sustentation d'une nacelle ou benne qui est tirée par un câble tracteur. Mais ce système sommaire a le gros défaut de ne pas être très performant.
Viennent alors les téléphériques doubles avec deux câbles porteurs parallèles et des nacelles reliées entre elles par un câble tracteur qui passe sur une poulie de renvoi de telle sorte que lorsqu'une nacelle descend, l'autre monte. C'est une amélioration notable qui double les capacités du téléphérique simple, mais qui ne peut satisfaire aux impératifs miniers qui ont besoin de pouvoir évacuer rapidement de plus gros tonnages.
Puis apparaissent alors les premiers transbordeurs composés d'un seul câble à la fois porteur et tracteur qui tourne sans fin entre deux poulies de renvoi, et sur lequel les bennes sont fixées à intervalles réguliers. Si ce système permet effectivement de transporter de plus gros tonnages, il a par contre l'énorme défaut de devoir arrêter l'appareil à chaque fois qu'on veut charger ou décharger une benne, ou alors de devoir tourner à une vitesse suffisamment faible pour permettre ces manoeuvres.
Principaux types de transbordeurs
C'est un Allemand, Adolf Bleichert, qui va donner ses lettres de noblesse aux transbordeurs en créant une pince débrayable qui permet de désolidariser les bennes du câble à volonté. Mais il faut alors qu'elles soient soutenues par autre chose. Bleichert aura donc l'idée complémentaire d'équiper la suspente des bennes de deux roulettes qui viendront rouler sur des rails placés sur le châssis des gares dans lesquelles elles seront alors poussées à la main par les ouvriers.
Ci-dessus et dessous, la pince Bleichert, véritable révolution dans la conception des transbordeurs
A gauche, pince sans sécurité
- A droite, pince avec sécurité de verrouillage
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La pince
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Mais, évolution aidant, les tonnages et les distances à parcourir sont de plus en plus importants. Pour supporter ces contraintes, le câble porteur tracteur devient de plus en plus gros, lourd et rigide, et nécessite une énergie considérable pour faire fonctionner l'appareil. Bleichert soumet donc une autre idée : Puisque ses bennes sont équipées de roulettes, tendre un câble porteur qui servira de rail entre les gares d'extrémités, et rendre au câble tracteur dont les contraintes redeviendront normales, sa légèreté et sa souplesse d'origine. C'est le transbordeur bicâble ci-dessous, à bennes débrayables, qui représentera l'aboutissement technique de ce mode de transport.
De plus, contrairement aux téléphériques classiques qui doivent être droits, ce système peut négocier des changements de direction en fonction des contraintes du terrain. Le schéma ci-dessous montre le principe de deux stations d'angle de modèles différents.
Autre système de station d'angle faisant appel à deux transbordeurs voisins mais indépendants
Bien entendu le système Bleichert sera étendu, copié et repris par divers constructeurs qui le déclineront de multiples façons, aussi bien pour des transbordeurs que pour des téléphériques, des télécabines, des télésièges, voire des téléskis. Mais, quoi qu'on en dise, le système de base reste toujours le même : celui de la pince Bleichert.
Divers usages et formes de transport civils, forestiers ou militaires du système Bleichert
Pince Etcheverry directement inspirée
de la pince Bleichert, qui équipe aujourd'hui la plupart des télécabines
ou télésièges modernes et débrayables
Son ouverture et sa fermeture sont commandées par la roulette
d'un bras mobile qui joue aussi le rôle de verrou de sécurité
Enfin, reste le problème de la mise en mouvement.
Il est directement lié au sens de circulation de la charge.
Si celle-ci descend, le poids des bennes chargées fait remonter les bennes
vides par simple gravité. C'est le principe du transbordeur automoteur
dont l'une des poulies de renvoi est simplement équipée d'un frein
qui permet de contrôler la vitesse ou d'arrêter l'appareil.
Si elle doit monter, il faut alors un moteur qui entraîne l'une des poulies
de renvoi. Dans les premiers temps, ce moteur sera représenté
par une machine à vapeur puis progressivement remplacé par des
moteurs thermiques ou électriques.
Notons enfin que les bâtis des gares et des pylônes seront en bois ou en poutrelles métalliques selon les endroits, les circonstances ou le budget de construction disponible.
Toujours est-il qu'à une époque où
les transports routiers lourds n'étaient pas encore de ce monde, et face
aux rigides contraintes des voies ferrées classiques, les transbordeurs
aériens présenteront un avantage appréciable par leur souplesse
d'emploi et l'important tonnage qu'ils peuvent déplacer par leur fonctionnement
en continu. C'est pourquoi nous avons essayé de restituer leur mémoire
tout en étant bien conscients que nos fiches sont très sommaires
car ces engins n'ont pratiquement laissé aucune trace dans l'histoire,
dans les archives et sur le terrain. Difficile donc de les décrire.